If i had a heart - Cyriel Tedaos

- MÉFAIT ACCOMPLI -

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Ici, il n’y a ni père, ni mère. Si vous vous étiez attendu à lire l’histoire de Cyriel Tedaos, alors vous serez extrêmement déçu. Il n’y a rien à raconter sur Cyriel. Ou plutôt, il n’y a rien de bon ou de beau à raconter. Cyriel, sur le papier, elle n’existe pas vraiment. Cyriel n’est qu’un masque, que tôt ou tard, je jetterai pour en prendre un autre.

Léto…Léto quant à elle, elle a une histoire qui pourrait peut-être vous intéresser, si vous aimez le sordide. Ce n’est pas moi qui vous jugerait. Léto, comme Cyriel, n’a ni mère, ni père. Elle a une multitude de frères, une multitude de sœurs et elle a Autolycos. Le vrai Loup. Le Loup en Personne. Celui qui a reçu le don de voler sans jamais se faire prendre.
Elle est née il y a 20 ans, dans un temple, sur une île à l’ouest de la Grèce que l’on nomme Ithaque. Elle a grandi avec d’autres enfants comme elle, qui n’avait ni père, ni mère. Destinée à suivre les traces d’Autolycos.

Ses journées étaient longues, très différentes des journées d’autres enfants de son âge. Entraînée à se battre, entraînée à devenir une arme, elle connut très tôt la douleur, la rigueur, loin de l'insouciance et de la douceur qu’on s’attend à observer dans la vie d’une enfant de son âge. Mais ne la prenez pas en pitié. Quelque chose qu’on ne connaît pas, ne peut pas vous manquer. La louveteau n’est pas triste, elle connaît très bien les lois qui régissent son monde, et même lorsqu’elle commencera à apprendre à quoi ressemble celui à l’extérieur du temple qui l’a vu grandir, elle ne ressent ni manque, ni jalousie, ni colère. Si elle se trouvait là, c’est qu’il s’agissait de sa destinée et elle l’embrassait tout entière. Parce que le destin, il ne fait mal que lorsqu’on lutte contre celui-ci.

Comme tous, elle essayait d’être la meilleure, et elle l’était parfois, à d’autres, elle devait faire face à des difficultés mais chaque chute, chaque coups, chaque hématome, chaque goutte de sang perdue, tout cela n’était qu’une occasion de plus d’apprendre, de s'améliorer, d’être une meilleure version d’elle.

Ainsi…Etait la vie de Léto.

On dit souvent que les loups ne se mangent pas entre eux, un mensonge en réalité. Léto, plus que quiconque, le sait. Elle l’a appris à ses dépends. Le louveteau, plus grand, plus lourd, plus fort, avait voulu d’elle, l’avait voulu avec force, avec le mépris de ceux qui pensent que cela leur est dû. Elle a lutté, très fort, elle a appris aussi. Elle est tombée, elle a eu mal. La première fois, elle n’a pas retenu ses larmes, elle a pleuré, elle a appelé à l’aide. La deuxième fois, elle a laissé faire, la troisième fois, elle a lutté, elle a échoué. Elle a arrêté de se battre, elle s’est dit, attend ton heure, elle viendra.

C’est une chasse, rien de plus.

A l’aube de ses 18 ans, il était temps pour Léto de quitter l’enfance, de devenir fille d’Autolycos, enfin. L’épreuve est simple, rester en vie, c’est tout ce qu’on lui demande.
La lune était pleine au-dessus de leurs têtes et elle se souvient encore de l’adrénaline, du champs des lycans, du bruits de leur pas courant à travers le bois. Rester ensemble, s’entraider, meute contre meute.

Les loups…Ne se mangent pas entre eux pas vrai ?
Mais il y avait un louveteau que Léto rêvait de dévorer et son appétit, ce soir-là, est plus grand que sa propre survie. Son heure. Cette fois, c’est elle qui frappera la première, rapidement abandonnée par le reste de la meute. Elle n’est pas en colère, ils sont plutôt malin de faire ça, de laisser les deux louveteaux régler leurs différends, eux, n’ont pas à risquer leur vie pour ça. Et après autant de temps, le louveteau a sous-estimé la louveteau, un coup, une artère tranchée, une giclée de sang, et elle le fixe, elle reste, jusqu’à la dernière minute, la dernière seconde parce qu’elle veut être sur qu’il ne se relèvera pas.

Oubliant où elle se trouvait.
Oubliant quel genre de monstre se cache dans cette forêt.

Les loups ne se mangent pas entre eux. Il faut croire que cette nuit-là, le loup n’a pas vu une louve lorsqu’il s’est jeté sur elle. Elle est peut-être rapide, Léto, mais pas assez pour se protéger de la morsure. Elle ne retiendra pas son hurlement. Mais elle refuse, ce soir, n’est pas son heure. Elle le sait, parce que l’animal fera une erreur, lui laissera une opportunité pour se dégager, pour fuir. Et elle peine à le faire, elle saigne, son odeur, sa piste est si facile à suivre et bientôt, ce n’est pas un loup mais plusieurs qui lui courent après. C’est dans l’eau froide d’un lac qu’elle trouvera un semblant de refuge. Plongeant dans l’obscurité qu’elle éclaire du mieux qu’elle le peut. La douleur, elle la chasse de son esprit, elle n’existe pas. C’est presque comme si elle quittait son propre corps.

Elle sait que les Moires n’ont pas encore décidé à couper le fil de sa vie lorsqu’elle découvre un passage. Étroit, dangereux, elle ignore combien de temps cela pourrait lui demander ni même combien de temps elle pourra encore retenir sa respiration mais elle fonce. Elle s’y engouffre et peut-être que ce sont les eaux du styx qu’elle remonte. Sans le savoir.
Quand elle revient à la surface, il fait sombre, la grotte, la nappe phréatique, elle n’en sait rien, le lieu est une cachette parfaite et elle est épuisée.

L’histoire de Léto aurait probablement dû s'arrêter là mais je vous l’ai déjà dit. Atropos ne veut pas couper le fil. Léto ne raconte jamais cette histoire, elle n’explique jamais qu’elle a cru entendre la voix de son mentor, qui lui ordonne de se soigner, elle n’explique pas les heures qu’elle passe à murmurer l'incantation avant de sombrer. Lorsqu’elle se réveille, il fait toujours bien sombre dans sa cachette, parce qu’ici. Il n’y a ni jour, ni nuit. Avec la lune, ses jours sombres sont tombés, mais avec le soleil, elle se lèvera, sans le savoir, plongeant à nouveau dans l’eau pour retrouver l’autre côté.

Les rayons du soleil sont salvateurs sur son visage. Elle a marché, sans trop savoir, elle a suivi un chemin, jusqu’à les retrouver, jusqu’à tomber au milieu de sa meute. Vivante, elle l’est. C’est tout ce qui compte. Et c’est là que je dois vous avouer quelque chose. Cette histoire. Ce n’est pas celle de Léto. Cette histoire, c’est celle de la naissance de Léto. Parce qu’avant ce soir, Léto n’existait pas vraiment, avant ce soir, ce n’était qu’une louveteau, sans nom, sans prénom, sans marque.

Léto, elle a un croissant de lune sur le corps, une trace, comme chacun de ses frères et de ses sœurs, un moyen pour qu’Autolycos sache toujours où se trouve sa fille. Léto est une chasseuse, une arme. On lui donne une cible et elle s’abat sur elle.

Mais il paraît que les loups ne se mangent pas entre eux.