I never get tired of dancing with you - Leonidas Trelawney

- MÉFAIT ACCOMPLI -

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*. 1920
Un midi comme les autres. Leonidas, garçon de huit ans peut-être, met la table avec application alors que sa mère s’occupe de faire manger les jumelles. Maintenant, il ne met plus que deux couverts “de grands”, et chaque jour, il repense à avant, quand l’assiette de leur père était en bout de table. “Maman?” Sa mère se tourne vers lui, essuyant la bouche de Pandora d’une serviette qui se macule de purée de carotte. “Non… rien.” Les yeux de Lysiana l’observent un instant. “ Tu peux me dire si quelque chose te tracasse, Leo.” Il opine doucement, réfléchit en triturant le rond de serviette. “Est-ce que c’est parce que je vois le futur que Papa est parti?” Les mots retenus si longtemps sortent enfin. Lysiana se détourne un instant de ses filles pour prendre son aîné dans ses bras, effarée du poids qui pesait sur son fils sans qu’elle n’en ait la moindre idée. “Non! Bien sûr que non, mon ange. Les adultes sont parfois compliqués, c’est tout.”



Devant lui, il y a cet élève qui titube un peu sous le poids des livres qu’il a empruntés. En voilà un qui se prépare pour une sacrée nuit de révisions. Mais soudain, il voit la porte battante, le gamin qui vole, les livres projetés en tous sens. Le gamin qui se relève, indemne, qui se relève en grimaçant, qui ne se relève pas. Les rires, et le silence. Il voit tout à la fois. “Hé!” Il l’interpelle et s’approche de l’élève. “Laisse-moi t’aider avec ça.” Du coin de l’œil, Leo voit la porte s’ouvrir sans percuter personne. Il sourit, lui prends trois livres des mains et les cale sous un bras. Il tends la main libre. “Leo Trelawney.” L’élève plus si chargé sourit. “Timothy Fleury.” Une poignée de main.



*. 1932
Il est resté assis sous le tilleul dans le parc. Au loin, il entend quelques rires, des conversations étouffées. Elle est partie depuis quelque minutes, et lui contemple le ciel, rêveur. “Ha, te voilà!” La voix de Timothy l’interpelle, et son meilleur ami vient le rejoindre sur son banc. “T’as passé la soirée ici? Ta cavalière dit que tu l’as plantée et que tu as disparu.” Leonidas a un vague sourire, perdu dans l’immensité de la nuit qui les couvre. “Tim… J’ai rencontré la femme que j’allais épouser.” Son ami hausse un sourcil. “Tu as eu une vision?” Enfin, les yeux clairs de Leonidas reviennent au monde, croisent ceux du jeune homme à ses côtés. Il secoue la tête, sourit tout doucement. “Non. Je le sais, c’est tout.”



Le parc est calme, et les feuilles parées des couleurs d'automne tombent à leur guise. Assis aux côtés de Pandora, il la regarde, attendri, câliner le chiot qu’il vient de lui offrir. Pourtant, ses yeux clairs se lèvent vers lui, presque craintifs. “Leo…je ne sais pas si je peux m’occuper de lui. Ils disent que…” Elle se tait, détourne le regard. “Que je ne fais pas la différence entre la réalité et les visions. J’ai peur de ne pas en être capable.” Le jeune homme écarte une mèche blonde vagabonde, caresse la joue de sa petite soeur avec tendresse. “Je ne me fais aucun souci, Pandora.” Il sourit doucement. “Il pourra t’aider dans les moments ou tu te sens perdue. Te garder ancrée.” Le chiot jappe joyeusement et lèche les doigts de sa nouvelle maîtresse. “Je vais l’appeler Hope.”



*. 1937
Il a le teint bronzé par le soleil toscan. La mode était à la Riviera française, mais Aislyn méritait plus original. La région de Leonard de Vinci avait de quoi les occuper. Et maintenant, ils étaient de retour en Angleterre en cette fin d’été. Mais il y a encore un cadeau que Leonidas veut faire à son épouse. Alors, les bagages à peine posés chez Lysiana, qui doit les héberger le temps que leur maison soit prête,, il la prend dans ses bras. “Ferme les yeux.” Elle rit. “Tu sais que je t’ai déjà vu nu ?” Mais elle ferme les yeux. Leo la regarde. Chaque minutes, chaque seconde, il ne peut qu’être émerveillé par cette femme et par la chance qu’il a de pouvoir l’aimer. Il pose ses lèvres sur les siennes. Un craquement sonore, et ils ne sont plus là. “En fait… j’ai menti.” Il sourit, amusé, amoureux, la laisse découvrir la maison dressée au milieu d’un petit jardin, à l’ombre d’un tilleul. “ C’est prêt depuis une semaine. Je voulais te faire la surprise.” Il voit ses oreilles rougir. Il a toujours adoré cette particularité chez elle. Il s’approche d’elle et entoure sa taille de ses bras, embrasse son cou. “C’est exactement comme je l’imaginais.” Elle se retourne pour lui faire face, l’embrasse à son tour. Il a le coeur qui déborde de bonheur et de l’envie de cette vie avec elle. “Me ferez-vous l’honneur, Madame Finnigan?” Un sourire en coin. “Avec plaisir, Monsieur Finnigan.” Elle saute dans ses bras et manque de le faire tomber. Et c’est avec Aislyn contre son torse qu’il passe, pour la première fois, le seuil de leur chez eux.



Aislyn s'est rendormie contre lui, la main sur son torse, la tête enfouie dans son cou. Lui n'y parvient pas. Les images tournent et retournent dans son crâne, comme des vautours. Les gigantesques champignons de fumée. La chaleur qui consume tout. Le silence de mort sur la ville asiatique dévastée. Les visages cadavériques des survivants, rongés par la faim, la peur, par une science qu'il ne comprends pas. La respiration se bloque dans ses poumons alors qu'il voit de nouveau le rouge et l'orange de l'explosion, encore et encore et encore. Il inspire l'odeur des cheveux de son épouse pour s'apaiser. Rouge flamme. Rouge drame. Rouge corps et rouge mort.
Il ne sait pas quand. Il ne sait pas ou exactement. Mais il sait qu'il doit faire quelque chose. Que les Moldus doivent être arrêtés.
Le nom s'impose à son esprit.
Grindelwald.



*. 1940
Elle n'est pas rentrée. La banshee hurle et elle est introuvable. Elle et le fils qu'elle porte. Les deux personnes sans qui il n'est plus rien. Elle ne réponds pas, et le hibou erre, sans la trouver, lui revient, le mot toujours attaché à la patte. Elle ne peut pas être morte. Elle ne peut pas. Il entends parler du dôme. Bien sûr. L'oiseau n'aurait pas pu y pénétrer. Alors il s'est porté volontaire. Il a aidé à soutenir les édifices manquant de s'effondrer. A patrouillé à la recherche de survivants, le coeur écrasé par l'angoisse. Elle est introuvable. Sa femme. Sa vie. Leur enfant.
On leur évoque les souterrains, où sont rassemblés les réfugiés. Il appelle son nom, interroge, en vain, tous ceux qu'il peut. "Aislyn Finnigan. Rousse, yeux bleus, taille moyenne, vous l'avez vu?" L'homme face à lui grommelle "Nan. Tu crois que j'ai retenu le nom de toutes les greluches qui passaient? T'as remarqué qu'on a tous failli clamser, ou pas? Ta grognasse, si elle est pas conne, elle est ici. Sinon, elle est…" Ses yeux s'enflamment. Il est pourtant d'un naturel doux, Leonidas. Mais la peur le ronge et lui fait perdre les pédales. Il empoigne l'ordure par le col et le plaque au mur, sa baguette pointée sur sa gorge. "Respecte. Ma. Femme." Il sent une main sur son épaule, entends vaguement qu'on prononce son nom de famille. Il se dégage, et plonge son regard dans celui de l'homme qui gigote. "Legilimens" La lumière se fait aveuglante alors que les bombes pleuvent de nouveau, que l'arbre s'enflamme. L'homme se concentre sur les incendies, mais Leonidas, lui, observe la foule, ces visages que le malotru a vu sans s'en souvenir. Rapide, furieux, il explore sans douceur, sans se soucier de la douleur qu'il inflige. Rage quand il ne trouve rien, passe à la scène suivante. Là! C'est elle. Elle est vivante.  Elle passe dans le champ de vision, titube, disparaît quand l'autre tourne la tête. Il fouille. Ecarte les souvenirs sans importances. La voilà de nouveau! Blottie contre une paroi de pierre. Prostrée.
Leonidas sort de l'esprit du pauvre type et le relâche sans un regard. S'oriente. Il doit trouver l'endroit. Chien en chasse, il fonce tête baissée jusqu'à enfin la voir devant lui. Elle est là. Elle respire. Sa colère se dissout dans le soupir de soulagement qui lui échappe et doucement, il la prends dans ses bras. Épuisée, mais vivante, elle semble à demi consciente "Je suis là, mon amour. Je m'occupe de toi." Il fait volte face. Devant lui se tient un collègue, le visage fermé. Il ouvre la bouche pour lui passer un savon mais en voyant Aislyn contre lui, choisit de se taire. "Tu devrais prendre quelques jours de repos, Trelawney. Pour que ça ne se reproduise pas… ou je devrais faire un rapport." Leo acquiesce, une unique fois. Souffle un remerciement, et tourne les talons. Il doit la mettre à l'abri.




Il a passé la nuit à la regarder dormir, se reposer. La potion donnée a été efficace semblerait-il. Elle a besoin de reprendre des forces. Le soleil de décembre enflamme sa chevelure, et il caresse sa peau avec un mélange de tendresse immuable et d'incrédulité en sa chance. Hier, il aurait pu la perdre. Les perdre. Et s'il a compris quelque chose en cette effroyable soirée, c'est que sans elle, il ne sait plus qui il est. Elle ouvre les yeux sourit, et il la prends dans ses bras pour une étreinte pleine de douceur. "Bonjour, ma flamme…" Il s'abreuve à ses lèvres. Mais il ne lui dit pas combien il a eu peur. "Comment te sens-tu?" "Explosée." Il rit doucement au trait d'humour piquant, lui embrasse le front.
"J'ai un cadeau pour toi." C'est quand même Noël, après tout. "Moi aussi… Toi d'abord." Il sourit et la redresse, dépose sur ses épaules son peignoir et la guide, la main sur les yeux, jusqu'au balcon de leur chambre. Il l'a ensorcelé pour retenir la chaleur et y a dressé une table de petit-déjeuner avec ses mets favoris. Et dans son assiette, un paquet enrubanné d'argent. "J'avais prévu plus que ça mais... j'ai dû précipiter un peu les choses. Ouvre !" A l'intérieur, de minuscules chaussons d'enfants en laine bleue. Un peu maladroits, les mailles inégales. "Carmenta a trouvé hilarant que je me mette au tricot…" Il rit doucement. "Ça sera un garçon, mon amour. Tu vas m'offrir un fils !" Les larmes perlent à ses yeux sous le coup de l'émotion, mais il les chasse bien vite, par une pudeur idiote. "Et je te promets d'être un père à la hauteur. Tu… Vous le méritez."